Igor Passe-Moelle – Armand Bouffleux (1968-2021)
Igor Passe-Moelle était au départ un simple plombier.
Sa capacité à dispenser à la ronde ses délectables plaisanteries l’a encouragé à se lancer dans la difficile carrière d’humoriste one-man-show.
Sa silhouette seule est déjà une invitation au rire : petit chapeau comiquement penché vers l’arrière, imperméable trop large, pantalons trop courts. Il prend un air renfrogné et mécontent et débite ses protestations :
C’est avec nos sous !
Président de mes fesses !
Igor se plaint de tout mais principalement de la vie chère.
Ses sketches s’enchaînent dans une véritable diatribe de la politique gouvernementale et du montant des impôts. Le public, qui s’y reconnaît, applaudit à tout rompre.
Empruntant, en hommage à la célèbre stance de Cubu, le savoureux pseudonyme d’Igor Passe-Moelle, il a une véritable prédilection pour les chansons joyeuses et se spécialise dans les rondes, farandoles et autres chenilles. Plusieurs fois disque d’or, je ne résiste pas à vous rappeler les paroles impérissables de son tube Igor le bouliste.
Oh je suis Igor le bouliste
Et j’suis un vrai spécialiste
Quand on m’dit qu’il faut pointer
Moi j’réponds qu’il faut tirer
Refrain
Et je tire et je tire
Et je tire et je tire
Et ça pétanque dans les calanques
J’ferais bien la bouillabaisse
De toutes les Marseillaises
Je fais toujours un carreau
Quand je sors mon tarot
Même si la galéjade,
Des fois ça sent l’aillade
Refrain
Oh j’suis Igor le bouliste
Et j’suis un vrai spécialiste
Moi, quand on m’dit qu’il faut pointer
Moi-heu je réponds qu’il faut tirer
On lui doit également :
― T’as de beaux yeux, poil aux cheveux !
ou encore :
― Mormon ? Mormon ? Oui, mais mormon quoi ?
(Igor Passe-Moelle, Dans l’trou du Duc, éditions du Malheur)
Il éleva le genre jusqu’à la poésie, et on l’a autant lu qu’imité.
Le pouvoir, qui craint toujours les coups par derrière, procéda le plus rapidement possible à son inhumation de crainte de se voir railler pendant tout le temps de sa gouvernance.
Georgie de Saint-Maur