Épisode 7 : Gringalus au pays de l’Huile Précieuse

 

Le roi et sa suite sont en visite éclair dans la Contrée de la Bybine. La sueur ruisselle sur la fourrure du monarque chimpanzé de la Contrée Hexagonale. La chaleur est telle que la place de la Liberté est déserte. Pas le moindre ouistiti pour l’acclamer ! Pire que dans sa contrée natale ! Avec un geste de rage, il entraîne sa suite visiter un musée. Les gorilles snipers bondissent de toit en toit pour assurer la sécurité du roi dans cette zone chaude.

Gringalus est très énervé. Il a hâte de repartir, lui qui ne tient pas en place et affectionne la multiplication des déplacements courts et superficiels. Et puis, c’est risqué comme coin !

 

Enfin ! Du monde sur la place. Son périmètre a été rétréci pour raisons de sécurité. La foule en liesse l’acclame ! Le vertige le saisit. Il n’a pas connu une telle popularité depuis le début de son quinquennat monarchique. Il respire à fond pour savourer l’instant présent, l’euphorie de la gloire : oubliés la chaleur, le risque, les centaines de millions d’euros bananiers dépensés pour bombarder les civils et accessoirement les troupes du dictateur, l’incertitude du nouveau régime de bananes qui va émerger des décombres…

 

Un brave chef de horde brandit son bébé. Il affirme l’avoir prénommé Gringalus. Le roi prend le bébé ouistiti dans ses bras. Il a plus de six mois… La foule hurle de joie. Gringalus est extatique, comme pris d’une attaque de paralysie. Un gorille le tire par la manche. Ah oui ! C’est dangereux de traîner. Vite, il lit le discours, deux minutes trente chrono.

— Nous disons simplement à nos amis bybiniens : dites-nous, jusqu'à quand, nous devons rester à vos côtés et nous le ferons.

 

« Hou là ! songe Gringalus, Henry a fait une répétition du verbe « dire », pas terrible pour un arnaque diplômé… Il est vrai que l’épreuve de culture générale a été supprimée à l’entrée de cette école, sinon on ne remplirait pas les classes… Passons. On signe un chèque en blanc aux ouistitis bybiniens mais c’est bien parce qu’il y a l’Huile Précieuse en perspective. Et les élections. Allez, on conclue par un foutage de bouche. »

 

— …nous-mêmes, membres de la Désunion des Républiques Bananées, nous avons toléré des régimes que nous n'aurions jamais dû tolérer.

 

Encore une répétition. C’est plus un effet de style, c’est du radotage…

 

« Et nous les tolérons encore, pense Gringalus. Nous ne sommes pas trop crédibles en donneurs de leçons, ça me fait drôle de l’avoir avoué avec sincérité. Ce doit être le manque d’habitude. C’est vrai que les politisinges hexagonaux sont très corrompus. Mais aussi, il nous faut bien vivre ! Le peuple chimpanzé ne se rend pas compte des dépenses que j’ai. Je dois payer la pension alimentaire à Cilia ! Puis-je vivre décemment avec la poignée de centaines de milliers d’euros bananiers de mon salaire officiel ? Tiens, ça me fait penser que maintenant que les envois de malles d’or en provenance du Continent Sudiste sont taris, il faudra organiser un transport furtif du fruit de la vente de l’Huile Précieuse bybinienne. À condition que les ouistitis cessent de s’entretuer avant les élections… »

 

 

Lordius