Editions de l'Abat-Jour

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Dans les épisodes précédents :
Psychœ a été enfermée dans le lieu noir.
Psychæ entre en scène..

Bureau de la police des cinoques...

L’ascenseur antédiluvien remontait péniblement trois personnes de la cave.

Le père chétif était de si bonne humeur qu’il sifflotait, avec entrain, un air de basse d’Alphonso Johnson.

— Alors, questionna-t-il en désignant le sosie de Psychœ, que dites-vous de notre petit doublon ? Mignon, n’est-ce pas ?

— Hélas, c’est un échec, père chétif : l’odeur n’est pas la même.

— Pas la même ? C’est-à-dire ?

— Pourtant, j’ai enfermé le double dans du plastique pour récupérer des molécules olfactives.

— Oui, ça c’est normal. Vous vous attendiez à des félicitations ?

— Puis je les ai soumises à un examen non invasif, une analyse spectrométrique de masse par flux d’ions.

— C’est bon pour une fois, mais accouchez, mon vieux, j’ai d’autres projets pour la journée.

— Eh bien voilà : elle ne sent pas la marée !

— C’est plutôt une bonne nouvelle, conclut le père en claquant des doigts tandis que Crochetrain mettait au point une imitation du jeu oculaire de Joséphine Baker.

— J’ai refait tous mes calculs, vérifié le fonctionnement de l’œuf diploïde. Rien à faire, l’odeur de marée a disparu !

— Bon ! D’accord ! Vous avez bien mérité de la patrie et gagné le droit à une promotion. Dès que j’ai une mission potable, je fais appel à vous.

— Oh merci, père chétif !

— Oui, ben, ne me remerciez pas trop vite.

Le bossu s’approcha du superbe fac-similé.

— Comment vous appelez-vous, ma chère ?

— Psychœuf.

Le père chétif ajusta une moue bienveillante sur son visage torve.

— Ne vous effrayez pas. Tout cela est encore très nouveau. Prenez votre temps.

— Psy… Psychæ, articula la réplique avec peine.

— Bravo ! applaudit son inquisiteur.

La copie était aussi belle que l’originale.

— Et pour qui travaillez-vous ?

— Euh… pour… pour la police des flous.

— Presque, encouragea l’indiscret.

— La police des clous ? hasarda Psychæ.

— C’est très bien, ce n’est pas grave. Ça viendra.

Psychæ ondula du buste.

— Voici un hologramme du Révérend, poursuivit le père chétif.

— Il n’a pas l’air fort malin.

— Il est un peu limité, c’est vrai, admit le père.

— Et puis il est habillé comme l’as de bique.

— Bon, passons, vous allez vous placer sous ses ordres.

— Sous les ordres de ce bouffon ? Mais pourquoi ? s’interloqua Psychæ.

— Mais, ma chère, parce que vous êtes un agent double.

— S’il faut avaler des microfilms en même temps que le copahu (1), ce sera sans moi.

— Et maintenant, une petite expérience : vous ai-je déjà montré ceci ? interrogea le père en baissant son calefouette.

— Hou ben, voilà le petit chose.

— Comment ça : « petit » ?

— Ça, c’est sûr qu’il ne servira jamais de mètre à talons.

— Si ça vous défrise, s’énerva le père, je peux toujours vous le carrer dans l’oignon en guise de test.

— Ouais, ben à propos d’oignons, occupez-vous des vôtres. Pour moi, ce n’est pas la paille qui compte.

— Je comprends. Vous voyez, le problème, c’est que la phonation est encore trop récente pour vous. Vous allez devoir apprendre, vous adapter. Mais, croyez-moi : un peu de pratique et vous deviendrez la syrinx de la sémiosphère.

— Sémiosphère ? Sémiosphère ?

Il la troussa comme un lapin.

1 « Avaler le copahu » : entendre son arrêt de mort.​