La pêche à la truite dans les rivières de N.D.Lay

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Je repensai à Da Silva et aux circonstances de sa venue à N.D.Lay quand le grand chaman m’a convoqué dans son bureau.
― Vous vous souvenez de Nicolas Ardberg ? me demanda-t-il.
Il connaissait la réponse. Staboulov a toujours su lire en moi comme dans un livre.
― Eh bien figurez-vous, a-t-il poursuivi, qu’il s’est échappé de Santa Rosa.
Il m’a balancé ça l’air de rien, en donnant un petit coup sec sur la ligne pour tester la réaction du poisson. Je n’ai pas moufté.
Il a continué :
― On l’avait à l’œil pourtant. Mais pas assez, faut croire. Comme vous le savez peut-être, il avait d’abord atterri à Saint-Alban, à la demande de sa copine. Il picolait pas mal à l’époque et entendait des voix, y’en a eu une, plus vicieuse, plus maligne peut-être, qui lui a demandé de faire un carton dans le magasin où il travaillait. Il a tout raconté à sa petite amie qui a tout de suite prévenu les flics. On ne peut se fier à personne, n’est-ce pas ?
― Et pourquoi a-t-il été transféré ici, ai-je demandé, il est français, non ?
― Effectivement. Mais sa copine est du coin. C’est même la fille du directeur de Santa Rosa. Gwendoline Mitchell. Marrant, non…
― Si on veut… 

Ce Nicolas Ardberg dans la nature, quelque chose me disait que ce n’était pas une très bonne nouvelle.
À la mort de Da Silva, il m’avait envoyé une bafouille complètement délirante :
« Je suis de tout cœur avec vous dans l’épreuve que vous traversez. Raoul, mon ami, m’a beaucoup parlé de vous. Il vous tenait en grande estime. Vous devez savoir qu’il ne s’est pas suicidé. Cela a sans doute à voir avec vos multiples recherches. Le grand Rimasky et la Sainte Rosa. Bien sûr, tout ceci doit rester entre nous. Bien à vous. Nicolas. »

Comme d’habitude, Ange Staboulov avait joué au con avec mes nerfs.
― Enfin, rassurez-vous, s’est-il marré, il a été retrouvé. Il chialait comme un gosse à côté du cadavre d’une jeune femme. Une camée. Une certaine Dounia Summers. Elle avait un couteau dans le bide.
― Il l’a… ?
― C’est ce que disent les flics. Lui se défend. Il accuse. Devinez qui ?
― Charly Wang ?
J’avais lâché ça sans réfléchir. Une évidence. Je m’étais souvenu de cette silhouette sombre sur le mur du White Swan et de cette inscription : « À la mémoire de Dounia Summers ».
― Putain, vous délirez ?
― Je plaisantais.
J’avais montré mes talents de pêcheur.
― Ouais… Notez, z’êtes pas tombé loin.
― Alors qui ?
― Jimmy Jones.


Édouard.k.Dive

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